Quatrième de couverture
Février 1927. Le Tout-Paris assiste aux obsèques de Marcel Péricourt. Sa fille, Madeleine, doit prendre la tête de l'empire financier dont elle est l'héritière, mais le destin en décide autrement. Son fils, Paul, d'un geste inattendu et tragique, va placer Madeleine sur le chemin de la ruine et du déclassement. Face à l'adversité des hommes, à la cupidité de son époque, à la corruption de son milieu et à l'ambition de son entourage, Madeleine devra déployer des trésors d'intelligence, d'énergie mais aussi de machiavélisme pour survivre et reconstruire sa vie.
Tâche d'autant plus difficile dans une France qui observe, impuissante, les premières couleurs de l'incendie qui va ravager l'Europe.
Couleurs de l’incendie est le deuxième volet d’une trilogie initiée avec Au revoir là-haut (Prix Goncourt 2013), et qui prend place en totalité entre les deux guerres.
Comme le dit l’auteur lui-même, il aime prendre un personnage plutôt « secondaire » du roman de départ, et en faire le héros principal de l’histoire suivante. C’est le cas ici, puisque l’héroïne de cette fresque vengeresse est Madeleine Péricourt, la sœur d’Édouard, un des deux poilus héros d’Au revoir là-haut.
Outre son intrigue, finement tissée et distillée, ce roman décrit une période (les années 20-30) qui est à la fois dynamique économiquement et financièrement. Les gens fourmillent d’idées, de projets et d’ambitions. A cette époque l’automobile est en plein essor et les bolides font rêver … les hommes, essentiellement. Pierre Lemaître décrit ce monde des affaires en recherche de financements, d’appuis politiques et de techniciens ultra-qualifiés. Et c’est exactement comme si vous lisiez le journal ! … Justement, il présente aussi très bien la Presse de l’époque et ses choix éditoriaux. Il est vrai que cet entre-deux-guerres est particulièrement agité et on voit la naissance de journaux aux opinions très tranchées, que ce soit aux idéaux communistes ou aux tentations fascistes. Au début des années 30, et suite aux accords ayant mis fin à la « Grande Guerre », l’Europe assiste impuissante et inquiète à la montée du Nazisme en Allemagne et les gens qui ont à se rendre Outre-Rhin sont tous à un moment en proie au doute : que faut-il faire avec ce nouveau Chancelier ? Est-il raisonnable de continuer à fréquenter le régime allemand comme si de rien n’était ? Cette question essentielle est illustrée par le personnage de Solange Gallinato, une cantatrice célèbre, et amie de la famille, et idole du petit Paul (fils de Madeleine, cloué dans un fauteuil suite à une chute du 1er étage de la maison familiale). Elle s’est prise d’amitié pour le garçon amateur de musique et envoûté par la voix de la cantatrice. Elle chante régulièrement à Berlin où elle est une vedette. Mais comment réagir face aux manières de cet odieux Chancelier ? Ce roman, enfin, est intéressant aussi par le fait qu’il dresse des portraits et des destins de femmes à une période durant laquelle, c'est le moins que l’on puisse dire, on ne les voyait pas beaucoup au-devant de la scène, en tous cas pour ce qui est des affaires, de la politique ou de la finance.
C’est dans ce contexte que Madeleine Péricourt voit lui tomber comme un fardeau cet héritage à la mort de son père, en même temps qu’un autre : l’infirmité de son fils Paul. Il n’en fallait pas plus pour créer les conditions idéales au festin des « requins » à la tête desquels on va trouver son oncle, un politicien veule et raté, mais revanchard.
C’est là que se déploie le talent de Pierre Lemaître, et sa capacité à tendre des pièges, à dérouler son intrigue, et à nous emporter dans les projets de vengeance de Madeleine, le tout dans des décors plus vrais que nature.
☺Quand on regarde çà et là les critiques de ce livre, le terme de « feuilletoniste » revient souvent … C’est dire la réussite de l’œuvre !
Pierre Lemaitre
Couleurs de l'incendie
(Albin Michel)
9782226392121
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