Quatrième de couverture
William est un faussaire spécialisé dans les livres. Il est doué pour l'écriture mais préfère griffonner incognito des poèmes pour un ami plus séduisant que lui et fabriquer des exemplaires factices de premières éditions de Jane Austen qu'il vend ensuite à des collectionneurs crédules. Il n'est pas si mauvais, au fond : il reverse l'argent récolté à un foyer pour SDF et ses crimes ne font de mal à personne.
Mais si William n'a rien fait d'autre de sa vie, ce n'est pas sans raison. Il a commis quelque chose quand il était étudiant qui lui fait honte, boit beaucoup trop et ne peut s'engager dans une relation amoureuse. Ah oui, et il voit des démons. Des silhouettes éthérées qui rôdent derrière le dos de ceux qui l'entourent, guettant un instant de faiblesse. À moins que William voie simplement la souffrance du monde ? C'est alors qu'une femme extraordinaire, peut-être capable de l'en sauver, entre dans sa vie...
William Heaney est un imposteur. Charmant, certes, mais un imposteur quand même. Aux prises avec ses démons et ceux des autres, il passe un peu trop son temps à vider la cave des meilleurs pubs de Londres. A l'occasion il prétendra même être le nom de plume d'un grand écrivain anglais. Méfiez-vous.
Une fois n'est pas coutume, voici un roman paru chez Bragelonne qui n'est ni de la fantasy ni du fantastique horrifique ou ésotérique, encore moins de la SF. Ce roman aurait pu paraître chez n'importe quel autre éditeur et risque de décevoir quelques adeptes des éditions qui nous ont habitués à des codes bien définis. Et pourtant, il serait dommage de passer à côté. La couverture et le titre accrocheur aideront à y remédier, heureusement, mais mieux vaut être prévenu : ce roman est avant tout un roman sur la remise en question. Celle d'un quinquagénaire qui porte le souvenir d'un acte survenu durant ses années d'études et qui a conditionné sa vie.
Cela traite donc du passé, de l'expérience, du poids de l'existence et de la recherche du bonheur. Il parle de l'adolescence et de l'âge adulte, du quotidien comme de la guerre, des faux semblants, de la solitude et de l'amour. Il répertorie tous nos démons intérieurs, les mauvais mais aussi les bons, et le fantastique se glisse là où ces démons se matérialisent. Sous nos yeux. Comme des images subliminales, trop vite pour en éclaircir les lignes, trop lentement pour faire comme s'ils n'existaient pas.
Ce roman est donc bien plus une métaphore de nos angoisses, de nos attentes, de nos espoirs et ce, sans aucun détour tortueux. Tout y est simplement raconté, avec réalisme et sincérité. Et si son fil conducteur n'est autre que la réalisation toujours repoussée d'une fausse première édition de Jane Austen, c'est peut-être aussi qu'un roman, c'est comme une vie, il faut le porter à maturité, lui donner toute sa consistance, avant d'en tourner la première page.
Un roman agréable, sensible, et au fond très positif, qui fait du bien.
William Heaney
Mémoires d'un maître faussaire (Memoirs of a master forger/Ascent of demons)
(Bragelonne)
9782352942665
Mots-clés : bibliophilie, démons, guerre, magie, métaphores, psychologie, rédemption, vétérans