Quatrième de couverture
Le meurtre a tout de l'exécution. Qui a bien pu tuer d'une balle dans la tête cet homme de quatre-vingt-douze ans ? Par ailleurs la victime, David Josua Goldberg, devait connaître son assassin car il n'y a aucune marque d'effraction, juste un chiffre mystérieux écrit sur le mur avec du sang. L'affaire devient encore plus étrange lorsque, à l'autopsie, on découvre, sur le bras gauche de Goldberg, la trace du tatouage effacé de son groupe sanguin. Comment peut-on trouver sur un Juif, rescapé des camps de concentration, ce signe infamant, celui que portaient tous les membres de la SS ?
Avant même que le très distingué commissaire Oliver von Bodenstein et sa collègue, la très prosaïque Pia Kirchhoff, aient pu commencer à enquêter, l'affaire leur est retirée par ordre du ministère de l'Intérieur allemand. Mais bientôt les meurtres se succèdent, tous plus énigmatiques les uns que les autres. Chaque fois les victimes sont très âgées et le mode opératoire d'une atroce cruauté. Bientôt, les deux enquêteurs concentrent leurs soupçons sur une famille éminemment respectée de la haute société francfortoise. Le lecteur s'infiltre peu à peu dans le monde fermé de la grande bourgeoisie allemande, qui, derrière les grilles de ses magnifiques propriétés, sait si bien garder ses terribles secrets...
Polar magistral, Flétrissure a imposé Nele Neuhaus comme un auteur de premier plan. Ses livres, vendus en Allemagne à des centaines de milliers d'exemplaires, sont en cours de traduction dans plus de vingt pays.
Débarrassons-nous d'abord des petits points négatifs surtout à l'encontre de l'éditeur : une couverture pas terrible du tout (un vilain montage Photoshop), un titre accrocheur (*) mais la traduction littérale du titre original Tiefe Wunden, Blessures profondes, reste plus proche du sujet (même si elle fait un peu "cul-cul"). Ensuite, il y a trois enquêtes qui sont sorties la même année, mais Flétrissure semble être déjà le troisième volet. Une manie agaçante (qu'ont d'autres éditeurs aussi) de traduire un roman qui fait partie d'un cycle sans commencer par le premier.
Ceci étant dit Flétrissure est effectivement un polar qui se dévore littéralement. Il se lit comme on regarderait ces feuilletons télévisés sur fond de sagas familiales (que j'adore : Dynasty ou Dirty Money). Et le clan de Vera Kaltensee, 85 ans, ne va pas laisser en paix une seule seconde l'équipe du commissaire von Bodenstein et sa co-équipière Pia Kirchhoff chargés d'élucider une suite de meurtres. Plonger dans ce polar c'est côtoyer ces gens riches, tous bien sous tous rapports, mais qui pourtant ont tous quelque chose à cacher. Nele Neuhaus dresse une toile étonnante qui nous entraîne tour à tour dans le passé de l'Allemagne et dans un présent de faux semblants. Secrets de familles, vengeance, usurpation d'identité, vice, jalousie, autant de facettes que toute cette bourgeoisie tente désespérément d'escamoter mais qui finiront par remonter à la surface.
Si le rythme est très soutenu on trouvera peut-être que le dénouement peine à venir. Parce que l'auteur a tellement imbriqué les éléments entre eux qu'il sera dur aux héros de tout démêler. La complexité du scénario s'essouffle un peu vers la fin et on a hâte d'en voir le bout, mais ce bémol ne retire en rien au plaisir général qu'on a à lire ce polar germanique et on espère que son succès justifiera la traduction des précédentes enquêtes et celles à venir.
(*) PS : pour en revenir au titre français, il est évidemment lié à la vieillesse de certains personnages et de façon anecdotique à la manie qu'ont au début du roman la plupart des personnages de se regarder dans les miroirs qu'ils croisent. C'est à souligner mais ce n'est pour autant pas un roman sur la "vieillesse". Donc ce titre m'embête.
Nele Neuhaus
Bodenstein et Kirchhoff T01 Flétrissure (Tiefe wunden)
(Babel Noir)
9782330013042
Mots-clés : enquête, Allemagne, jalousie, milieu bourgeois, nazisme, secrets de famille, usurpation, vengeance